L’actualisation d’un film de promotion pour le concours « Musiques en courts » a été l’occasion de réaliser une copie DCP destinée aux avant-programmes du cinéma le Trianon à Sceaux (92). Le DCP, ou Digital Cinéma Package, est l’équivalent numérique de la copie 35mm pour les systèmes de projection Digital Cinema dont sont désormais équipées de nombreuses salles en France.
La fabrication d’un DCP aux normes DCI* est habituellement l’affaire des distributeurs et des prestataires spécialisés. Il me semblait cependant intéressant de maîtriser cette technique pour la réalisation de programmes destinés aux premières parties de séances ou en vue de projections ponctuelles, hors exploitation commerciale nécessitant la gestion des KDM**. Le cinéma numérique offre une formidable opportunité de diffuser son travail pour un coup quasi nul, en comparaison d’un tirage de copies 35mm, et pour une qualité bien supérieure à celle d’une projection numérique réalisée à partir d’un lecteur Blu-Ray.
Une version courte en avant-programme
Entre 2007 et 2008, j’avais réalisé un film de promotion pour « Musiques en courts » à la demande de la ville de Sceaux, sous la forme d’un petit documentaire ; le sujet avait été écrit par Agnès de Coqueréaumont et le commentaire enregistré par Virginie Aster. Voir à ce propos l’article : « Musiques en courts », concours de composition de musiques de films.
Le règlement du concours et les partenaires ayant changés depuis, la ville de Sceaux a commandé une version actualisée du film ainsi que le montage d’une version courte. Cette dernière étant destinée au cinéma le Trianon pour une projection en avant-programme durant les quinze jours précédents l’événement, c’était l’occasion de s’intéresser de plus près à la création d’un DCP.
Création d’un DCP au format SMPTE
La réalisation d’un DCP ne présente aucune difficulté particulière avec de bonnes bases informatiques en audiovisuel. Il est même possible de se passer d’un logiciel spécifique, même si ce dernier fait gagner du temps et évite les erreurs dans l’écriture des fichiers de meta-données qui seront nécessaires au lecteur DCP. J’ai pour ma part utilisé OpenDCP, un programme en open source simple mais efficace, pour lequel on peut saluer le travail des contributeurs. La possibilité d’effectuer des tests en cabine de projection est ensuite indispensable puisque le package ne peut être lu en dehors du système D-cinema.
Fin 2007, le tournage du film pour « Musiques en courts » s’était effectué au format DVCPro HD en mode 25P. L’équipement numérique du cinéma le Trianon étant compatible avec la dernière norme SMPTE autorisant la projection en 25 images/s, il a été possible de créer un DCP sans changer la cadence d’images ni syntoniser le son. Il est à ce propos étonnant qu’il ait fallu attendre presque dix ans pour que la cadence 25 i/s apparaisse sur les projecteurs numériques, alors qu’elle était souhaitable dès le départ pour s’accorder avec les standards TV et vidéos européens. Pour infos, les cadences de projection 2D sont désormais 24, 25, 30, 48, 50 et 60 i/s.
Un DCP ou Digital Cinema Package SMPTE est constitué :
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- d’un ou plusieurs fichiers .mxf contenant l’image en résolution 2K ou 4K, compressée en Jpeg2000 et convertie à l’espace colorimétrique XYZ.
- d’un ou plusieurs fichiers .mxf contenant le son au format PCM en 48 ou 96 kHz, échantillonné en 24 bits.
- de quatre fichiers de meta-données .xml (VOLINDEX, ASSETMAP, la Packing List et la Composition Playlist) permettant au lecteur DCP d’assembler correctement les éléments constituant le pack, de synchroniser l’image et le son selon la bonne cadence de lecture, d’afficher le bon format d’image et les sous-titres éventuels… Ils comportent également des informations sur le type et le contenu de l’œuvre, ainsi que le public auquel elle est destinée.
- de fichiers de sous-titres et de polices de caractères auxquels nous n’avons pas eu recours.
Le pack ainsi constitué est copié pour livraison à la racine d’un disque dur externe, ce dernier étant formaté au système de fichiers Ext3 et pourvu au minimum d’une connexion USB2. Sur ces points, les systèmes D-cinema les plus récents semblent apporter une certaine souplesse par rapport aux préconisations. J’ai pour mon compte utilisé un petit disque dur Lacie 2,5 pouces formaté en NTFS. Le système fonctionnant sous Linux au Trianon était non seulement capable de lire la partition, mais de détecter automatiquement tous les DCP de test classés dans des sous-répertoires et d’effectuer ainsi sans incident leur transfert sur le serveur du cinéma.
Qualité de projection et confort d’écoute
Le résultat est une image lumineuse sur grand écran, sans artéfact de compression, au rendu des nuances fidèle, sans perte de détails dans les hautes et basses lumières. A titre de comparaison, le débit choisi lors de l’encodage en Jpeg2000 était de 130 mb/s contre 25 à 32 mb/s maximum pour un DVD Blu-Ray.
Quant au son, une normalisation à -12 dB FS pour la voix off et pics à -3 dB FS pour la musique a permis de s’aligner sur le niveau sonore ressenti pour les autres programmes, ceci sans correction de la part du projectionniste. Profiter dans ces conditions du confort d’écoute d’une salle de cinéma moderne a été un vrai régal avec la prise de son effectuée au tournage par les techniciens du studio la Caisse Claire à Sceaux.
Un petit clin d’œil pour conclure… Sur les systèmes D-cinema, tout est programmable, jusqu’à la durée d’extinction progressive des lumières de la salle. Tout est gérable à distance, à commencer par le transfert des DCP et KDM via Internet. On est loin du charme de Cinema Paradiso ! A quand les spectateurs virtuels ?
Par Alexandre Eymery